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  • Bénédicte Le Gall

Julie Berchoux, des restaurants étoilés à la vente à emporter

Après avoir travaillé dans plusieurs restaurants étoilés de la capitale, la cheffe Julie Berchoux a décidé de se lancer dans la vente de plats à emporter.


A seulement 15 ans, Julie Berchoux quitte l’école traditionnelle pour passer son BEP cuisine. Une fois son diplôme obtenu et ses 18 ans révolus, elle s’expatrie un an au Royaume-Uni pour travailler dans un restaurant étoilé de la banlieue de Londres. Le projet : voir du pays et améliorer son niveau d’anglais. Mais rapidement, c’est la désillusion : « Le chef se croyait tout puissant dans sa cuisine, il était violent avec ses employés, et avec moi encore plus parce que j’étais une femme » ; « Je suis rentrée chez moi avec des cicatrices » témoigne Julie. C’en est trop pour la jeune femme qui décide de parler de ces agissements au propriétaire de l’établissement, qui renvoie immédiatement le chef.


La cheffe Julie Berchoux ©Julie Berchoux

A son retour en France, elle retente l’expérience de l’étoilé, en rejoignant un établissement gastronomique de luxe. Là encore, l’ambiance de travail est empreinte de misogynie : « J’ai commencé à penser que, si je voulais réussir dans ce métier, je devais me comporter comme un homme ». Elle raconte : « Tous les midis avant le service, le chef servait des shots d’alcool à toute l’équipe : si on refusait de boire, il nous malmenait » ; « Puisque j’acceptais on me laissait tranquille, mais je me souviens d’une fille qui était victime d’harcèlement sexuel parce qu’elle ne buvait pas ».


Elle part donc travailler dans les cuisines de l’hôtel Le Scribe, avant de poursuivre son ascension vers un établissement doté de trois étoiles au guide Michelin. Mais, à 25 ans, elle décide de mettre fin à son expérience en restaurants gastronomiques : « J’étais tellement obsédée par l’envie de monter en grade que je marchais sur les autres pour y parvenir : je n’aimais pas le personnage que je devenais » ; « Je voulais arrêter avant que cet environnement toxique ne déteigne trop sur moi », confie Julie.


Elle plie alors bagages pour la Suède, où elle travaille pendant six mois dans un restaurant de la capitale. Là-bas, une nouvelle opportunité s’offre à elle : intégrer les cuisines d’un restaurant haut de gamme sur un bateau de croisière. Curieuse de découvrir l’envers du décor, elle accepte sans hésiter.


A son retour, elle contracte la maladie de Crohn. Ne pouvant plus manger aucun aliment acide ou à base de fibres, l’exercice de son métier s’avère plus compliqué. Passionnée, elle poursuit malgré tout son activité, et occupe des postes de cheffe dans différents restaurants de la capitale.


Mais après quelques années, sa carrière prend un nouveau tournant : elle démissionne pour s’installer en banlieue parisienne, et devient cuisinière dans une MECS, Maison d’Enfants à Caractère Social. « Au début, le patron pensait que j’étais trop qualifiée pour le poste, et que j’allais partir au bout de quelques semaines », se rappelle-t-elle dans un sourire. Pourtant, appréciant cette nouvelle vie loin du quotidien stressant des brigades, elle y reste plusieurs années.


Puis, elle réalise son rêve en ouvrant son propre restaurant. Malheureusement, malgré un petit éventail d’habitués, l’affaire s’écroule rapidement : « J’ai mis longtemps à comprendre que je devais m’adapter aux clients, et pas l’inverse » ; « Malgré les demandes, je me refusais à proposer certains plats incontournables, ce qui m’a fait perdre un bon nombre de visiteurs ».

La crise du Covid et le confinement la poussent à se renouveler : Julie, pour passer le temps, commence à filmer des tutoriels de recettes qu’elle poste sur sa chaîne Youtube. Fort du succès de ses vidéos, elle répond aux sollicitations de certains de ses abonnés et commence à proposer des ateliers de cuisine en présentiel.


C’est alors que vient le déclic : elle veut de nouveau lancer son business, cette fois-ci uniquement en vente à emporter. Favorisée par la fermeture des restaurants, « Berchoux » connait un vif succès dès son ouverture. La carte, renouvelée quotidiennement propose des repas abordables faits maison, élaborés à partir d’ingrédients achetés auprès de producteurs locaux. Engagée, la cheffe place l’écologie au cœur de son projet : « Chaque semaine, je vais au marché : les commerçants me vendent à bas prix leurs invendus, que je réutilise dans mes recettes » ; « C’est ma façon de lutter, à mon échelle, contre le gaspillage alimentaire ». Pour les clients qui apportent leurs propres contenants, une réduction est appliquée lors du passage en caisse.


A la rentrée dernière, « Berchoux » s’est agrandi : Julie a récupéré le local d’à côté pour en faire une petite cantine. Chaises, tables et couverts sont mis à disposition des clients qui peuvent s’installer pour déguster les plats de Julie au chaud : « Au début, le propriétaire n’était pas particulièrement séduit par mon idée, mais les habitants de l’immeuble lui ont écrit une lettre pour le convaincre : et ça a marché ! », s’exclame l’entrepreneure. Elle ajoute : « Ce qui me plaît le plus dans mon activité actuelle, c’est mes clients : j’ai beaucoup d’habitués, et j’apprécie toujours autant échanger avec eux ! ».

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